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Une lourde dot

 

Un écu d’or

Quand le jeune Thimoléon de Daillon (il a 22 ans), épouse Marie Feydau, en 1622, le contrat de mariage passé le 16 avril, nous dit que la jeune fille reçoit une dot de 500 000 livres, ce qui est colossal. La livre du début du XVIIe siècle valait 11 g d’argent métal, ce qui fait au cours de 2018, 4,51 €, soit plus de 2 millions d’euros de dot ! Thimoléon, fils aîné de François et Françoise de Schomberg, a succédé à son père, décédé en 1619, comme comte du Lude et marquis d’Illiers ; il appartient à ces familles de la noblesse, évoluant dans l’entourage proche du roi depuis plusieurs générations, pourvues de hautes charges. La promise est fille d’Antoine Feydau et Louise Payot, née en 1604. Le père est un riche financier, on dit aussi « traitant » ou « partisan », de ceux qui passent contrats avec le roi pour lever l’impôt, à cette époque Louis XIII. Ils avancent au roi, sur leurs deniers personnels et par de gros emprunts, le montant de l’impôt et se remboursent ensuite sur les rentrées, avec bien sûr un confortable bénéfice, ce qui les rend très impopulaires, y compris auprès de la noblesse, qui les méprise. Antoine Feydau cumule les « traités » avec le roi : il est trésorier de L’Épargne, fermier général des aides de 1611 à 1625, fermier général des gabelles de 1622 à 1624, il dirige donc les deux plus grosses fermes de France des impôts indirects. Ce mariage conclut l’alliance classique de la naissance et de l’argent. Mais ce qu’on oublie facilement, c’est qu’en ce temps-là, pas encore de papier monnaie, toutes les transactions se font en espèces « sonnantes et trébuchantes », en pièces, qui sont lourdes : un louis d’or pèse 6,79 g, un écu d’argent 27,9 g. Un historien a calculé que la dot de 500 000 livres de Marie Feydau (la livre tournois est une monnaie de compte, il n’y a pas de pièce métallique portant cette valeur), représente 4531 kg d’argent ou encore 339, 5 kg d’or ! Antoine Feydau avait acheté une seigneurie à Bois-le-Vicomte, où il avait fait construire un superbe château sur trois étages. Dans ce monde de la finance, les fortunes sont importantes mais à gros risques : régulièrement les rois se sentant lésés, créent des chambres de justice pour poursuivre les traitants, les condamnent à de lourdes taxes, et pour assurer l’avance au roi, ceux-ci doivent emprunter de plus en plus : Antoine Feydau est mort ruiné, en 1627, aux Pays-Bas, où il avait fuit, après avoir fait banqueroute.